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Caravane Amoureuse

Le piano amoureux de Marc Vella

Aimer nous libère de la victime. L’amour est un choix qui nous rappelle à tout moment que le plus grand responsable dans la vie c’est soi-même
Claire-Marie Germain
Claire-Marie Germain
Mis à jour le 25 février 2021
Marc Vella, pianiste amoureux, sillonne les routes du monde en caravane pour promouvoir la paix et l’échange culturel. Rencontre avec un homme dont la philosophie est façonnée par les voyages.

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Marc Vella et son piano ne s'arrêtent jamais. Toujours en mouvement, ils ont bourlingué sur tous les continents. De passage en France entre deux voyages, Marc nous parle de l'amour, son moteur.
Qu'est-ce qui se cache derrière la "Caravane amoureuse" ?
Je voyage avec mon piano depuis mes vingt-quatre ans, ça fait bientôt trente ans. J’ai fait six tours du monde avec ce piano ! La "caravane amoureuse" est née en 2004 parce que mon public, qui suivait mes concerts et mes voyages, a exprimé le désir de m’accompagner. C’est  grâce à la CITRAM, société de transport aquitain qui m’a donné trois autobus, que ce projet a pu se concrétiser. Le PDG, un monsieur très sérieux derrière son bureau, a été touché par le projet. Puis la caravane amoureuse a été reconnue par l’UNESCO en 2006. Elle est mise en avant dans le cadre de la Décennie Mondiale pour la Paix.
Comment se passe concrètement une tournée de la Caravane amoureuse ?
Les gens prennent l’avion et on se retrouve sur place avec les bus et un 4x4 pour le piano. En suivant un parcours préparé à l’avance, on part à la rencontre des peuples, avec l'idée de mettre à l’honneur ceux qui oeuvrent  pour l’amour et pour la paix. C’est une aventure sans prétention, on dort chez l’habitant la plupart du temps. La musique est un prétexte pour rencontrer les populations locales et pour aller dans des endroits où on ne pourrait pas aller normalement comme les prisons, les hôpitaux ou les écoles.  
D'où vous est venue l'idée de ce projet ?
Quand j’avais 20 ans, j’avais envie de vivre le monde. Je ne voulais pas me contenter d’un CD pour découvrir la musique africaine ou de photos pour voir Tahiti ou la banquise, je voulais me frotter à la vie.  Il y a des gens qui vivent par écran interposé : leur sexualité, leurs désirs, leurs rêves, leurs envies, leurs évasions, tout se passe derrière un écran. C'aurait été un calvaire pour moi.
Y a-t-il une rencontre qui vous a particulièrement marqué ?
L’une des rencontres les plus fortes a eu lieu au Pakistan, à Djelloum, dans le fief taliban en 1997. Je prenais l’air avant un concert lorsque j’ai rencontré un groupe de talibans. Ils étaient une quinzaine et moi j’étais tout seul. Ils m’ont demandé si j’étais musulman ou chrétien. Je leur ai répondu que j’étais un amoureux... Peut-être m'ont-ils pris pour un farfelu, mais au moins, ils m’ont laissé tranquille. Plus tard, l’un d’eux est revenu et nous avons parlé deux heures. Il réalisait qu’il était pris dans une spirale destructrice, un phénomène de groupe duquel il ne pouvait pas se dégager. Pourtant il aurait aimé vivre autre chose. C’était très émouvant. Ces hommes peuvent être barbares lorsqu’ils sont en bande, mais pris individuellement, ils peuvent également être magnifiques, c’est toute l’absurdité humaine.
Comment peut-on en arriver aussi loin avant d’être pris de remords ?
D’abord il y a la dynamique collective comme on la voit à l’œuvre chez les jeunes en banlieue ou en Afrique chez les enfants-soldats. Ce phénomène a tendance à faire taire la conscience individuelle. Et puis les médias en rajoutent, ils imposent à chacun une image qui correspond au feuilleton qu’ils essaient de nous vendre. Les gens se retrouvent caricaturés et figés dans des rôles simplistes. On crée nos monstres.
Si les médias stigmatisent certains groupes de personnes c’est parfois à raison, non ?
Dans nos sociétés il y a une jouissance de l’horreur, il faut diaboliser. Il faut raconter la trahison, la mort, le sang, le crime. L’émerveillement, la joie, l’amour, le vibrant, le vacillant… Personne n’en parle. Il y a un déséquilibre : ce qui est montré ne correspond pas à la réalité. Or plus on montre le laid, plus on doute, et plus on doute, plus le laid augmente. Il y en a qui veulent porter un sillage de mort et de sang, c’est un choix. Ca peut paraître naïf ou utopique mais je préfère porter un sillage de joie, de sourire, de bienveillance.
Pouvez-vous me parler de la "fausse note" ?
La fausse note est inévitable, ça arrive à tous d’être maladroit ou de manquer de discernement. Alors on se sent coupable. Et puis il y a la fausse note des autres, qui eux aussi peuvent être à côté de la plaque ou malveillants. L’indélicatesse de l’autre est source de colère, elle nous positionne en victime. Ces deux attitudes, culpabilité et rancœur, sont très nocives. Dans le livre que j’ai écrit, L’éloge de la fausse note,  je travaille à réintégrer les fausses notes dans l’harmonie, à accepter le mal pour en faire du bien.
Le mal peut-il vraiment engendrer du bien ?
Bien sûr, séparer le bien et le mal est une absurdité car le mal est nécessaire, il est porteur de dynamique pour aller vers le beau. Si on refuse le mal, on casse la dynamique et on n’avance pas. Il faut arrêter de diaboliser, de condamner. Il faut accueillir et transformer, c’est finalement tout le message christique d’il y a 2000 ans.
Vous prônez la compassion pour ce qu’il y a d’intrinsèquement mauvais dans l’humain…
Tout à fait. Le vrai chemin spirituel ce n’est pas de se mettre sur un petit pouf avec un bâton d’encens, c’est d’accueillir sa vraie nature, d’aller au plus profond de ses ombres et de les rendre lumineuses. Au lycée j’avais un ami, un petit Algérien d’un mètre cinquante qui se battait tout le temps. Aujourd’hui, il donne des stages de thérapie corporelle : il apprend aux gens à faire de la percussion sur leur corps. Il ne blesse plus les autres, il leur fait du bien, tout en restant fidèle à sa nature. Quant à moi, à vingt ans j’étais fou des filles. Lorsque j’avais une copine, mon cœur battait pour cinquante autres. Je ne comprenais pas pourquoi et je me sentais coupable. Puis j’ai réalisé que chez les filles, c’était pareil. Ce désir que j’avais pour les êtres m’a poussé à prendre mon piano à queue et à partir à travers le monde rencontrer les humains. Le désir est un moteur colossal qu’il ne faut pas brider. 
Avez-vous un message de Noël pour nos lectrices ?
Je conseille à vos lectrices de lire le livre du Docteur Slaumembaum qui s’appelle Femme désirée, femme désirante et qui approfondit tout ce dont on vient de parler. Il évoque notamment des problématiques de femmes par rapport à la vie, à la sexualité, à l’épanouissement personnel. Il y a une phrase que j’aime beaucoup dire : "Quoiqu’il arrive, aimez". Les talibans ou Daesh ne sont pas uniquement en Syrie. Ils sont ici quand les gens se jugent ou se critiquent. Bien sûr ça n’a pas la même portée mais il y a autour de nous des gens qui rasent les murs, qui sont tentés par le suicide. Aimer nous libère de la victime. L’amour est un choix qui nous rappelle à tout moment que le plus grand responsable dans la vie c’est soi-même

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