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Interview

Jacques Lecomte et l'optiréalisme: "Le monde va beaucoup mieux que vous ne le croyez"

Et si changer personnellement, c'était aussi changer le monde?
Pixabay
credit cooperatif Economie humaine
Claire Sejournet
Claire Sejournet
Mis à jour le 25 février 2021
Avec son livre Le monde va beaucoup mieux que vous ne le croyez, Jacques Lecomte jette un pavé dans la mare : tout est loin d’être aussi noir que ce qu’on nous annonce à longueur de flash infos. Rencontre avec un humaniste, précurseur de l’optiréalisme et convaincu que le meilleur reste à venir.

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Docteur en psychologie et ancien journaliste, Jacques Lecomte s'intéresse depuis longtemps à la psychologie positive. Précurseur, il a fondé l'Association française et francophone de psychologie positive en 2009 et a porté le concept d'optiréalisme. Auteur de nombreux essais, il a enseigné les sciences de l'éducation à l'université Paris-Ouest-Nanterre La Défense. Il signe en ce mois de février 2017 un passionnant ouvrage aux éditions Les Arènes, Le monde va beaucoup mieux que vous ne le croyez.

 
Qu’est-ce qui vous a incité à écrire ce livre ?
En 2015, je me suis trouvé dans une situation paradoxale : tout le monde disait que c’était une année pourrie. Mais entre les attentats de janvier et ceux de novembre, l’ONU a publié un rapport qui dressait le bilan des actions du Programme du millénaire. En le lisant, j’ai réalisé que le monde allait beaucoup mieux que 15 ans auparavant. Bien sûr que les attentats qui ont frappé la France sont une chose grave. Mais ça ne veut pas dire tout ! La France n’est qu’une partie du monde et 2015 une partie du temps. Si on prend une vision plus large du temps et de l’espace, le monde va mieux qu’avant. J’ai eu envie de faire passer l’idée qu’il y avait un décalage entre l’image qu’on en avait et la réalité. Ca a été le point de départ de l’écriture.

Comment votre message est-il reçu ?
J’ai commencé à parler de cette question dans des conférences. D’abord, ça surprend. Mais je cite toujours scrupuleusement mes sources, qui sont des institutions de références, comme l’ONU et ses agences, et les chiffres parlent d’eux-mêmes. A la fin des conférences, les gens sont contents, soulagés : ce n’est pas ce qu’ils entendent dans les médias ni lisent dans les journaux mais ils sentent que c’est sérieux.

Pensez-vous qu’il y ait de la désinformation dans les médias ?
Il y a de tout : il y a des journalistes qui donnent de fausses informations, parfois volontairement, souvent involontairement, il y a ceux qui déforment l’information, ceux qui ne donnent que les aspects négatifs sans contrebalancer avec ce qui est positif. Or une information partielle est partiale. Dans les médias, il y a une grave disproportion entre les informations négatives et positives.

Serait-ce parce qu’on dit que le négatif fait vendre ?
Comme je l’explique dans mon livre La bonté humaine, c’est un grand mythe ! La violence ne fait pas vendre. Cette illusion est véhiculée par les journalistes, qui traitent l’information sous cet angle. Mais ce faisant, ils ne répondent pas à une demande, ils la créent. Les gens achètent ce qu’ils trouvent ! J’en veux pour preuve le succès phénoménal du film Demain, dont la publicité s’est faite par le bouche-à-oreille. Un autre exemple est le « Libé des solutions », qui ne propose que de l’information positive et qui est un grand succès en kiosque. De même, je pense que nous avons besoin d’un droit de suite dans le traitement de l’information. Pendant des années, on nous a montré le trou de la couche d’ozone qui s’agrandissait. Maintenant qu’il diminue, personne n’en parle ! On a tiré la sonnette d’alarme lors de l’épidémie du virus Zika, mais on ne nous dit pas que l’ONU a annoncé qu’elle était enrayée. Si on ne parle que de ce qui ne va pas, forcément on pense que tout va mal.

Pourquoi est-il important d’avoir de l’information positive ?
Il faut passer à l’acte pour changer de vision du monde. Je pense qu’il est possible d’envisager une société de bienveillance, d’empathie et de coopération. Si on ne présente que le noir, on s’enfonce dans le désespoir et l’immobilisme car on a l’impression qu’on ne peut rien faire à notre échelle. Il faut montrer des évolutions positives dans la société, car les exemples inspirants nous donnent envie d’agir.

Vous employez beaucoup le terme d’ « action »…
Je suis lucide sur le fait que le meilleur et le pire peuvent arriver. Il faut donc rester actif, on ne peut pas être dans un optimisme de l’attente. On doit croire à ce que l’on veut voir arriver. Sans être méchant, dire « ce n’est pas possible, vous êtes un rêveur », c’est laisser faire ! Si on n’y croit pas, on peut être sûr que cette société de coopération, à laquelle je suis personnellement attaché, ne va pas arriver. En y croyant, cela ne veut pas dire qu’elle va forcément arriver. Il faut aussi agir.

La société de coopération que vous appelez de vos vœux induit la confiance réciproque, mais celle-ci est loin d’être acquise…
Nous sommes des coopérateurs conditionnels, c’est-à-dire que nous sommes prêts à agir si les autres agissent aussi. La confiance en l’autre est donc très importante, c’est la base de la motivation à coopérer. On peut créer des spirales vertueuses par la confiance et la coopération, faisons donc le premier pas ! Si on vous fait confiance, votre première réaction, c’est d’être digne de cette confiance, pas de la trahir. La confiance est une prise de risque car elle contient une part d’inconnu mais c’est un risque à prendre car le monde ne peut pas vivre sans.

Il faut donc travailler sur soi pour changer le monde ?
Changer personnellement aide à changer le monde, mais ça va prendre du temps. Pour aller plus vite, il faut aussi que certaines décisions soient prises au niveau national. Par exemple, on sait que l’apprentissage coopératif est bien meilleur pour les élèves et les professeurs que l’apprentissage compétitif. On pourrait dire que c’est aux enseignants de prendre la main sur les méthodes d’éducation. Mais on aurait surtout besoin d’un gouvernement qui le préconise !

Vous êtes donc partisan du "top-down" en parallèle du "down-top" ?
Je pense que c’est un mythe de penser que le salut vient uniquement de la base ou d’en haut.Il y a des situations où le courage du dirigeant est d’aller contre l’avis général. Je pense par exemple à Mitterrand qui avait annoncé pendant sa campagne qu’il abolirait la peine de mort même si la majorité des Français étaient contre à l’époque. Le train du changement vient des deux côtés.

Vous avez une haute estime de la valeur « courage »…
C’est essentiel. Pour moi, l’incarnation du plus grand courage, c’est Nelson Mandela. Il a choisi de façon lucide de faire de ses adversaires des partenaires. Aller contre ceux qui nous soutiennent pour discuter avec ceux qui sont contre nous, ça demande une grande dose de courage. ‘Négocier c’est trahir son camp’, disait Rocard. On ne pourra jamais être tous d’accord, si on ne discute qu’avec ceux avec qui on est d’accord, on ne va pas loin.

Etes-vous optimiste ?
Je me définis comme optiréaliste. C’est-à-dire que je suis foncièrement optimisme, mais je sais qu’il vaut rester vigilant et actif pour que le monde avance dans la bonne direction. J’ai longtemps fait partie d’une minorité, mais désormais nous ne sommes pas loin du point de bascule, le moment où l’engouement pour la construction d’une société collaborative va devenir exponentiel. Il faut être persévérant pour tenir jusqu’à l’accélération. Comme je le dis à plusieurs reprises dans mon livre, « la prudence reste de mise ». Je suis lucide sur les risques, car si nous avançons dans un sens, d’autres forces vont dans l’autre sens.
 

Jacques Lecomte est l'auteur de Le monde va beaucoup mieux que vous ne le croyez paru aux éditions Les Arènes.

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