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La consommation, un acte citoyen

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femme sac courses Je vote au quotidien
Claire Sejournet
Claire Sejournet
Mis à jour le 25 février 2021
Et si vous votiez au quotidien ? C'est l'avis d'Herveline Verbeken, pour qui nos actes d'achat sont une forme de vote. A l'occasion des élections présidentielles 2017, elle lance un projet 100% citoyen : Jevoteauquotidien.fr. Elle nous explique tout sur les choix que l'on peut prendre au quotidien pour donner un signal sur le monde que l'on veut pour demain !

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Quel a été le déclic pour prendre en main votre consommation ?
Le vrai déclic a été pour moi, comme pour beaucoup, un souci financier. Une baisse imprévue de revenus mais des frais à honorer, tout en ne souhaitant pas baisser la qualité des repas : nous ont amenés à chercher de nouvelles solutions.
Nous nous sommes tournés vers le zéro déchet, vers l’occasion, mais aussi et surtout vers une interrogation profonde de nos comportements de consommateurs… Interrogation qui a révélé de nombreuses surprises ainsi que des habitudes dont nous n’avions même pas vraiment conscience.

L’origine de cette baisse de revenus étant liée au burn-out auquel a été confronté mon mari, la réflexion sur notre consommation s’est doublée d’un cheminement sur l’origine de notre besoin de consommation, de notre besoin de revenus, et donc, de notre rapport au travail. De travailler plus, monter en grade pour pouvoir accéder à un niveau de vie meilleur (pour consommer plus), nous avons progressivement décidé de parcourir le chemin inverse : accepter de consommer moins, avoir besoin de moins d’argent, pour ne plus se sentir esclave de notre travail... et ainsi gagner en temps, en confort et en qualité de vie, en zénitude.

Plus que consomm'acteur, vous considérez les Français comme des conso-citoyens. Pouvez-vous nous expliquer en quoi l'acte de consommer est une forme de vote ?
Être citoyen, ce n’est pas juste déposer un bulletin dans une urne tous les 5 ans en croisant les doigts pour que la personne élue ne trahisse pas trop ce qu’on attend d’elle… C’est en réalité bien plus que ça. Les citoyens ont beaucoup plus de pouvoir sur la société qu’ils ne le pensent : chaque fois qu’ils dépensent de l’argent, ils financent un système. Par voie de conséquence, ils peuvent choisir de financer un monde plus juste et plus sain, qui se préoccupe plus de l’autre, humain ou non humain, de la planète, de l’avenir de nos enfants.

Voter pour un personnage politique, c’est le mandater pour nous représenter et défendre nos intérêts dans des situations qui nous concernent. On pourrait attendre d’eux qu’ils prennent des mesures fortes et cohérentes pour préserver notre santé et la Planète, pour mettre en place une réelle éducation financière, pour arrêter cette course effrénée à la consommation qui nous pousse à nous endetter, à vivre à découvert alors que la répartition des richesses est profondément inégalitaire, à travailler toujours plus alors même que la répartition du travail est, à l’heure de la mécanisation et de l’automatisation (et de la délocalisation !) complètement à réinventer. Mais en attendant, nous subissons chaque jour cette absence de décisions politiques fortes dans notre quotidien.

Or de par nos choix de consommation, jour après jour, nous pouvons agir sur toutes ces questions de santé, d’écologie, de consommation, d’endettement, ou encore de travail. Le tout, c’est de découvrir que c’est possible, que ce n’est pas une utopie et que c’est même beaucoup plus à notre portée que nous ne le pensons au départ.  
Le scepticisme et le doute sont très souvent présents à la veille de se lancer dans cette aventure, mais voter par nos actes de consommation quotidiens, c’est remplacer la rancœur, le dépit et l’inquiétude par l’espoir, tout simplement.

Vous avez fondé un groupe sur Facebook pour créer une communauté engagée sur la question de la consommation responsable et vous avez écrit un livre (J'arrête de surconsommer). Qu'est-ce qui vous passionne dans ce sujet ?
Ce qui me passionne, c’est de montrer aux gens qu’en réalité, même si on a un petit budget, on peut avoir accès à une nourriture saine et plus largement à une consommation qui ne se fasse pas au détriment d’autres êtres vivants. C’est le pari que l’on fait avec Marie, chaque jour, et qui porte ses fruits, chaque jour.
Ce qui nous passionne, c’est de prendre la question de l’écologie par un bout différent et plus efficace. Souvent, on pense que la prise de conscience de l’urgence climatique ou de l’état de la Planète est le prérequis pour consommer mieux, plus éthique, plus écologique, plus sain. Or, ce type de prise de conscience est très souvent douloureux, il dévoile une montagne colossale à déplacer… et fait se sentir très impuissant. Face à l’inconfort mental profond que cela induit, très souvent des mécanismes d’évitement prennent le relai. Les portes se ferment au lieu de s’ouvrir.

Les personnes qui se battent pour survivre, pour nourrir leur famille, pour payer leurs factures, n’ont pas la disponibilité nécessaire pour faire entrer dans leurs critères de consommation l’éthique et l’écologie… Et c’est normal, une question de priorité intervient. Toute personne qui a connu de telles situations ne pourra nier que dans ce cas, la priorité, c’est la survie, la famille.
C’est pourquoi nous choisissons une stratégie différente : nous abordons les choses du côté du quotidien. En proposant en premier lieu aux gens de les aider à sécuriser leur budget et à apprendre à faire des économies durables, nous les amenons à quitter le mode survie sans pour autant avoir augmenté leurs revenus. Sans le savoir, ils apprennent de nombreux gestes écologiques, ils apprennent que prendre en compte l’autre n’est pas incompatible, bien au contraire, avec sortir la tête de l’eau. Quand ils ont passé ce stade de sécurisation, non seulement leur consommation a changé pour une consommation durable, mais en plus, ces personnes deviennent très souvent beaucoup plus réceptives aux problématiques écologiques et éthiques, beaucoup plus engagées aussi.

Et c’est vraiment ce qui est le plus incroyable dans cette expérience, d’avoir construit la possibilité de mener une action profondément écolo auprès d’un public qui, au départ, n’en a pas les moyens, ne l’est pas forcément ou même pas du tout !

Vous allez plus loin aujourd'hui avec un site internet Jevoteauquotidien.fr, qui regroupe plus de 500 témoignages de femmes sur le sujet de la prise de conscience de l'impact de leur consommation. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Je vote au quotidien, c’est un projet entièrement citoyen, entièrement bénévole, et entièrement positif. En novembre dernier, Cécile, un membre de notre communauté virtuelle, a proposé qu’on se présente aux élections présidentielles, avec les parrainages de 500 mères. On a trouvé le jeu de mot "500 maires/500 mères" fantastique et on a commencé à imaginer ce qu’on pourrait en faire ! Parce que finalement, les présidentielles, c’est le moment où la citoyenneté revient dans le discours public, c’est donc l’occasion rêvée de faire redécouvrir aux gens leur citoyenneté, sous un angle différent. Une citoyenneté dans laquelle ils sont acteurs, où chacun d’entre eux a une légitimité.

On dépense tous de l’argent, pour plein de choses, et chaque euro dépensé finance et façonne notre société. Donc concrètement, on vote déjà tous au quotidien. Le problème, c’est que tant qu’on n’en a pas conscience, on ne vote pas forcément pour un système qui défend nos intérêts ou qui est bienveillant à notre égard. C’est pourquoi, travers ce projet, nous proposons des alternatives pour utiliser cet argent (que l’on dépense de toute manière) pour façonner une société plus équitable et plus positive.
Dans le site du projet, nous avons vraiment essayé de montrer que c’était possible, accessible. Dans la rubrique témoignages, nous avons catégorisé les récits en fonction de la situation quotidienne des personnes afin que les lecteurs puissent lire directement les petits et grands pas des personnes qui leur ressemblent.
Dans les pages ressources, nous présentons des pistes concrètes pour modifier notre consommation.
Dans les pages FAQ, nous proposons de répondre aux doutes et aux angoisses qui peuvent survenir… et que l’on a toutes et tous eus.
Mais en fait, c’est surtout un condensé de ce qu’on fait chaque jour au sein de notre communauté : créer des conditions positives pour qu’une réflexion constructive, sans jugement et pleine de bonne humeur s’installe.

Que vous inspirent tous les témoignages que vous avez reçus ?
Ces témoignages, clairement, nous motivent à continuer notre action, tout comme ils motivent toutes les personnes qui, au début du chemin, les lisent. Ils sont en effet porteurs d’un espoir incroyable. Ils témoignent du fait que l’être humain a un potentiel de changement bien plus rapide que ce qu’on imagine. Nous avons débuté cette aventure il y a 18 mois seulement. Toutes ces personnes qui ont témoigné, ont changé leur vie en quelques mois seulement, malgré les difficultés financières, malgré les freins et les doutes du début, malgré un point de départ parfois critique. Parfois même, les répercussions de ce changement se font sentir jusque dans le rapport au travail, quand elles choisissent de travailler moins, ou de quitter des entreprises qui sont en contradiction avec leurs valeurs !

L’être humain a un potentiel incroyable de changement, à condition qu’on trouve le bon levier. Et clairement, ces témoignages montrent que le moteur le plus puissant, c’est le positif. Accepter de rompre avec la colère, la rancœur, l’envie, modifier sa vision des choses, accepter sa vie sans en imaginer une plus argentée, ne rend pas les individus résignés, bien au contraire : ils puisent dans le positif l’énergie nécessaire à leur propre changement… et au changement global de notre société vers une société plus juste, de fait.

Enfin bien sûr, tous ces témoignages nous inspirent de la gratitude. De la gratitude envers tous ces êtres humains qui ont eu le courage de changer leur vie. C’est tellement beau !

Quel serait le meilleur conseil que vous pourriez donner à nos lectrices qui souhaiteraient se lancer dans une autre manière de consommer ?
Hormis le frein financier que nous aidons à lever grâce à des méthodes de gestion budgétaires, ce qui revient le plus souvent au début, c’est le facteur temps : changer de manière de consommer, c’est souvent faire plus de choses soi-même, sortir des sentiers battus, et les journées ne font que 24 heures !
Mais la clé, la vraie clé, ce n’est pas de vouloir faire plus, mais d’accepter de faire moins. De simplifier son quotidien, de se détacher de l’idéal de perfectionnisme qui nous anime tous… tout en restant bienveillant avec soi-même ! Ainsi, le meilleur conseil que l’on puisse donner, c’est de ne pas chercher à tout faire… mais juste, de se lancer, et commencer par l’action qui nous parle le plus, quelle qu’elle soit. Le reste viendra ensuite naturellement en temps et en heure.
Comme on dit souvent : à bas le perfectionnisme !

Pour aller plus loin :
- le livre d'Herveline et Marie, préfacé par Cyril Dion : J'arrête de surconsommer (Eyrolles)
- le site : Je vote au quotidien
- le groupe sur Facebook
 

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