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My Change 21

My Change 21 : Biocal de saison

Manger bien, c'est passer à la consomm'action
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My Change 21
Sonia Bellouti
Sonia Bellouti
Mis à jour le 25 février 2021
Passer au bio, un effort trop important ? Sonia nous explique ses motivations et partage ses astuces pour s'y mettre en douceur et devenir consomm'acteur, pour de vrai.

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« La France est le premier consommateur européen de pesticides et le troisième mondial, derrière les Etats-Unis et le Japon. L'Union européenne est le principal producteur et 72% des ventes sont destinées au marché communautaire » 
David Servan-Schreiber dans Anticancer (edition 2012 revue et augmentée)

Ce sont des raisons de santé qui m’ont poussée à m’intéresser à la qualité de mon alimentation, il y a de ça plusieurs années. En 2005, à l’occasion d’un licenciement et la volonté de changer de métier et de vie, j’avais mené une étude de marché de la bio. Peu de magasins, que des petits commerces de quartier pas comme les autres et souvent vétustes, un peu poussiéreux qui ne donnaient pas envie. dans mon esprit, seuls quelques rescapés de la période hippie et spécimens « new-age » les fréquentaient, et je ne parle pas du prix, que je trouvais prohibitif.

Ces arguments, je les entends encore aujourd’hui et j’aime les démonter en démontrant que oui il est possible de dépasser la question du prix (et je dirais même que nous devons le faire), que les boutiques bios ne sont pas moches, qu'elles sont de plus en plus nombreuses, très tendance et très fréquentables.

Le coût est dans le "près"
La bio coûte « objectivement » 30% plus cher… ou plutôt, je devrais dire les produits de l’agriculture conventionnelle sont trop peu chers. L’agriculture bio est défavorisée par rapport à l’agriculture conventionnelle. Les exploitations d'agriculture intensive sont abondamment aidées, c’est lié au système de subventions qui favorise épouvantablement l’agriculture intensive. 

Les prix mentent aux consommateurs car l’agriculture conventionnelle, que nous pouvons qualifier d’industrielle tant ses rendements sont élevés, ne reflète pas les coûts cachés à la collectivité : la désertion des campagnes, la détérioration des sols, la pollution des eaux, le prix du transport des denrées et les émissions de carbone induites… 

Et je ne parle pas des conséquences de l’appauvrissement des sols et de la biodiversité. les sols abritent 80% de la biomasse vivante, et nous sommes en train de tuer ce qui est à la source même de la vie. Plus le sol s’appauvrit, plus il faut d’intrants pour maintenir les rendements. Les conséquences à long terme sur la biodiversité mais aussi sur notre santé sont méconnues à ce jour, car cette forme d’agriculture n’existe que depuis les années 1950. Mais en mangeant de plus en plus de produits à la fois appauvris sur le plan nutritif et ruinés par la chimie, nous payerons très cher de notre santé, ce qui se répercutera sur notre système de santé déjà bien dégradé.

Si nous devions réellement tout intégrer dans le prix de revient, chaque aliment, fruit, légume conventionnel coûterait bien plus cher et le prix réel n’en serait plus du tout compétitif, bien au contraire. 

Comparons les choux et les carottes !
Deuxième argument bio-sceptique : l’agriculture biologique ne peut nourrir tout le monde, les rendements sont bien trop faibles. 

Sais-tu comment sont calculés les rendements justement ? Dans l’agriculture conventionnelle, souvent en mode monoculture, on calcule la production à l’hectare d’une seule variété : blé, riz, maïs, soja, pomme de terre… Or, du point de vue de l’agro écologie, la même surface mise sur la diversité des cultures combinées. donc avec ce même mode de calcul les rendements sont forcément plus faibles.*

Par ailleurs, 20% des agriculteurs dans le monde utilisent 80% de la superficie agricole, la plupart du temps pour la production d’agro-carburants ou de céréales pour nourrir le bétail, donc des monocultures intensives qui ne réduisent en rien la famine dans le monde, je dirais même qu’elle y contribue !

Les 20% restants sont répartis entre des petits producteurs (de 2 à 20 hectares) et produisent jusqu’à 75% de l’alimentation mondiale. D’abord en autoconsommation et en consommation locale (des chiffres qui souvent ne sont pas intégrés dans la comptabilité mondiale) et les principales denrées alimentaires sur les marchés. Les subventions vont rarement (voire pas du tout) à ces producteurs qui souffrent de la compétitivité agressive des grosses machines agro-alimentaires – industries, distribution…

Court-circuit et circuits courts 
En voulant préserver un semblant de paix sociale, notamment le prix bas des denrées alimentaires, les autorités favorisent un système qui mène à notre perte, que ce soit sur le plan de la santé, de l’économie, de l'éthique et du social. Les discours bio-sceptiques sont alimentés par des données et statistiques tronquées, qui sont devenus la norme. Le problème est que l’approche productiviste a contribué à augmenter la pauvreté rurale et a accentué les problèmes de santé liée à une alimentation de mauvaise qualité.

D’où l’importance de manger local, mieux encore d'acheter directement au producteur qui n’aura pas à négocier ses prix et surtout réduit les coûts logistiques qui forcément ne les rend pas compétitifs. C’est à nous consommateur de changer ce paradigme, d’inverser la tendance. C’est à nous de choisir le système agroalimentaire dont nous dépendrons demain. après tout, cela ne fait que 60 ans que nous fonctionnons ainsi, il est encore temps de revenir en arrière, en gardant ce qu’il y a de meilleur du passé et des avancées technologiques.  

Conseils pour changer ses courses et son alimentation.
« Il ne faut pas attendre d’être parfait pour commencer quelque chose de bien »

Je ne me souviens même plus de la dernière fois où j’ai mis les pieds dans un supermarché. Mais je te rassure, je n’en suis pas arrivée à ces nouveaux comportements du jour au lendemain. Cela s’est fait très progressivement en passant par quelques écueils, résistances et de grosses erreurs de jugement. Avec le recul, je peux te dire que choisir de court-circuiter la grande distribution en privilégiant les produits frais, de saison et bio n’est pas qu’une question d’argent.  

Si tu pars de zéro ou presque, ou si tu dois faire des compromis pour des raisons budgétaires, voici quelques pistes. Le principal est de prendre doucement mais sûrement de nouvelles habitudes, jusqu’à oublier les anciennes. Un jour, comme moi, tu te réveilleras en te disant « mais comment je faisais avant ? » !

- dans un premier temps, sans trop perturber tes habitudes, tu peux t’approvisionner au super/hypermarché. les rayons bios sont de plus en plus achalandés, et les prix plus abordables qu’en boutique.

- commence par sélectionner quelques aliments à consommer uniquement en bio avant de le généraliser à toute ton alimentation :

  • les produits animaliers (œufs, viande, lait …)
  • les pommes, les fraises, les pêches, le raisin (et le vin), la salade, les épinards et la pomme de terre (et autres légumes racine)
  • les huiles

Au début, tu peux continuer à consommer avocat, bananes, agrumes, fruits et légumes à peaux épaisses non bio avec moins de risque de contamination.

- tu peux réduire ta consommation (et donc les déchets), pour une autre répartition du  budget : moins mais mieux.

- tu peux te passer petit à petit des produits transformés industriels : pauvres en nutriments, plein d’additifs et très chers ramenés au kilo. les produits frais demandent certes un peu plus de temps de préparation, mais au moins tu nourriras correctement ton corps. Non, le temps ce n’est pas de l’argent, c’est du plaisir et de la santé mentale comme physique !

- il y a souvent un distributeur de panier frais (fruits et légumes bio si possible), près de chez toi ou de ton bureau. C’est l’assurance de consommer local et d’avoir toujours le frigo plein de produits frais et de saison

- tu apprendras à te passer progressivement des produits ménagers souvent très chers et trop élaborés en les remplaçant par des formules de base comme par exemple le vinaigre blanc pour le détartrage ou en liquide de rinçage dans le lave-vaisselle tout aussi efficace. c’est un gain de budget considérable.

Rendez-vous le mois prochain pour parler "viande et industrie animale" !

(*) : Olivier De Schutter, rapporteur spécial pour les Nations Unies pour le droit à l’alimentation dans le monde entre 2008 et 2014, affirme dans un rapport rédigé et soumis au Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies en mars 2011, que l’agroécologie peut tout à fait nourrir le monde.

 

Sonia Bellouti est l'auteur du livre Les tétons flingueurs, paru aux éditions Kawa.

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