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Comment répondre aux questions des enfants sur la mort ?

Comment parler de la mort aux enfants ?
Lorsque le deuil est là, la parole est le meilleur soutien
© Benjamin Manley/Unsplash
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Emilie Cuisinier
Emilie Cuisinier
Mis à jour le 12 août 2022
Sujet tabou et anxiogène par excellence pour les adultes, la mort suscite de nombreuses interrogations chez les enfants. Il est fondamental d'y répondre sans détours… mais avec quelques précautions.

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Cet article a été publié dans le  magazine FemininBio #19 octobre-novembre 2018
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Dis maman, quand on meurt, c’est pour la vie ?",
"ll est où, Papi, maintenant qu’il est mort ?", "Et toi, quand est-ce que tu vas mourir ?"
Ces questions souvent désarmantes, la plupart des parents y ont été confrontés, sans toujours savoir de quelle manière y répondre. 

Ne pas détourner le regard ni la conversation

Lorsque les questions fusent à l’heure du bain ou au milieu d’un repas joyeux, plus d’un adulte serait tenté de botter en touche. Pourtant, nous explique le docteur Romano, il est fondamental de répondre aux interrogations d’un enfant sur la mort : "Celui qui questionne ses parents a déjà une théorie en tête. Il faut lui répondre de la manière la plus simple possible. C’est important de parler de la mort. On peut avoir peur de le traumatiser, mais ce qui blesse le plus psychologiquement, c’est de ne pas en parler."
Car pour les enfants, plus encore que pour les adultes, bien souvent la parole apaise.

Bien sûr, si le sujet arrive à un mauvais moment de la journée, il faut jouer la carte de la franchise : ne pas éluder le sujet mais expliquer que, si la question est importante, on a besoin de temps pour y répondre. On peut peut-être différer la réponse au soir même : "L’enfant doit savoir en tout cas qu’il ne s’agit pas d’un tabou. Refuser de lui répondre, c’est prendre le risque qu’il s’imagine la vérité comme plus angoissante qu’elle ne l’est déjà."

Identifier une éventuelle angoisse

Quels que soient le moment choisi et l’âge de l’enfant, l’objectif premier pour l’adulte est de savoir ce qui se cache derrière sa question. "Cela peut venir d’une angoisse, peut-être en a-t-il entendu parler à la télévision ou par un camarade… Vers 8-9 ans, on commence à intégrer que lorsque l’on meurt, c’est pour toujours, et cela peut être très anxiogène", alerte Hélène Romano.

Pour désamorcer une angoisse naissante ou déjà ancrée, il est fondamental, explique la psychothérapeute, de montrer à l’enfant que ce qu’il nous dit ne nous fait pas peur.
Pour susciter un échange, on peut lui demander, même s’il est très jeune, ce qu’il sait déjà, comment cela se passe, selon lui, lorsque l’on est mort : "Chercher à savoir pourquoi un enfant pose cette question à ce moment précis est important. Certains enfants peuvent être endeuillés à l’école sans que les parents soient au courant…"

Laisser l’enfant forger ses croyances

Partir de la théorie de son enfant est toujours une bonne solution lorsque l’on aborde un sujet sensible avec lui. Elle lui indique que l’on est pleinement à son écoute. Reste ensuite à transmettre ses propres référentiels, en fonction de son éducation, des rituels de sa culture et de sa religion éventuelle. Sur ce sujet, comme sur beaucoup d’autres d’ailleurs, il est en tout cas fondamental de ne pas porter de jugement de valeur.

Enfin, concrètement, pour répondre notamment aux plus jeunes, on évite absolument de dire que mourir c’est "s’endormir pour toujours", au risque d’engendrer chez l'enfant des troubles du sommeil.

Rappeler la valeur de la vie

Au rang des réactions à bannir également : celle qui consiste à gronder un enfant qui vient d'annoncer, avec candeur et simplicité, à son aïeul qu’il va bientôt mourir. Pour le grand-parent qui reçoit cette "annonce", c’est l’occasion d’aborder la question de la transmission, en expliquant à l'enfant que lorsqu’une personne décède, on ne l’oublie pas.

Aborder la mort avec les enfants, c’est aussi l’occasion de les aider à prendre conscience de la valeur de la vie et de la nécessité d’en savourer chaque instant. "On peut en profiter pour leur rappeler de prendre soin d'eux, de leur corps. Si elle est parfois difficile, on doit prendre la vie telle qu’elle est, car on en n’a, a priori, qu’une seule."

Bien sûr, précise Hélène Romano, l’idéal est d’évoquer la mort dans des moments où il n’y a pas de deuil et de l’intégrer au cycle de la vie : "On peut dire à son enfant que lorsque l’on a fini de vivre, le cœur s’arrête et l’on meurt. Un papillon vit une journée, une tortue, plus de cent ans. C’est la nature, l’ordre des choses…"

Aider l’enfant à vivre son deuil

Lorsque le deuil est là, la parole est aussi le meilleur soutien, rappelle le Dr Romano.

"Il ne faut jamais penser que l’on préserve un enfant en lui disant que ce n’est pas grave, en faisant comme si de rien n’était. Lorsque vient Noël et que l’un des deux parents n’est plus, on peut évoquer cette douloureuse absence en allumant une bougie, par exemple. Les non-dits et le déni créent des interdits de penser très violents… qui finissent par resurgir un jour ou l’autre."

Face aux angoisses d’un enfant qui a déjà perdu un parent et se demande ce qu’il adviendra de lui si l’autre disparaît, le dialogue, encore, est le meilleur allié, en abordant clairement, par exemple, la question ensemble : "L’essentiel est de mettre des mots sur ce qu’il ressent."

Il ne faut en tout cas jamais minimiser ou dissimuler sa propre peine : "Il faut aider l'enfant à faire sortir le chagrin, le prendre dans ses bras et pleurer avec lui. Mieux vaut pleurer à l’extérieur qu’à l’intérieur." Entourer l'enfant de patience, de compréhension, quelles que soient nos limites personnelles, permet de l'aider à puiser dans ses facultés à rebondir.

 

Hélène Romano est psychothérapeute, spécialiste des blessures psychiques et auteure, entre autres, de L’Arbre et l’ombre de la lune publié aux éditions Courtes et Longues, le premier livre jeunesse ayant osé employer le mot "suicide" dans ses pages.

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