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Sous la couette

Slow sex pour se faire plaisir et faire l'amour en conscience

Prendre son temps pour prendre du plaisir
Pressfoto / Freepik
Emilie Cuisinier
Emilie Cuisinier
Mis à jour le 25 février 2021
Et si, pour mieux déguster notre plaisir, on oubliait un instant notre quête de l’orgasme ? Le chemin qui peut conduire à la jouissance est tout aussi savoureux. Démonstration argumentée.

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Cet article a été publié dans le magazine Fémininbio #16 Avril-Mai 2018

Il n’est pas si lointain le temps où seul l’homme pouvait disposer de son désir et de son plaisir. Où l’on faisait fi des préliminaires, où le point G n’avait pas encore été découvert et où l’orgasme féminin était tabou.
Il y a quelques semaines paraissait Entre mes lèvres, mon clitoris (1), un ouvrage sous-titré "Confidences sur un organe mystérieux", entièrement dédié au plaisir féminin… Une nouvelle preuve qu’en la matière, en 2018, des territoires restent inexplorés.

Longtemps le plaisir sexuel a donc été l’apanage de l’homme. Et puis, il y a 140 ans, Freud osait enfin parler du clitoris, le réveiller… mais sans lui donner toute la place qu’il mérite, nous explique Alexandra Hubin, sexologue et coauteure de l’ouvrage: "Dans une société phallocentrée, il transmettait une représentation sociale de l’époque : l’orgasme mature, celui des vraies femmes, était l’orgasme vaginal, qu’il fallait absolument distinguer de l’orgasme clitoridien." Une représentation sociale dichotomique sur laquelle semblaient encore se reposer, il y a une vingtaine d’années, les magazines féminins qui nous proposaient des tests pour savoir si nous étions plutôt "vaginale" ou "clitoridienne". Une question qui en a fait trembler plus d’une tant on nous assénait que l’orgasme vaginal était plus puissant et plus facile à atteindre, par le biais de la pénétration.

"Des sexologues pionniers de leur discipline se sont rendu compte que ce n’était pas aussi clair pour toutes les femmes. Certaines en ont entendu parler, mais l’on reste encore dans une forme d’obscurantisme clitoridien, ajoute Alexandra Hubin. Un regard négatif qui subsistait il y a vingt ans et subsiste encore parfois aujourd’hui." L’intention des auteures de ce livre qui explore enfin en profondeur le brûlant sujet du clitoris ? "Montrer que les femmes ne doivent pas être dans une limitation. Le plaisir vient de cet organe, qu’on peut stimuler par voie externe ou par voie interne, via les parois vaginales lors de la pénétration. Nous devons arrêter de nous mettre des œillères", partage la sexologue.

Barrières mentales et idées préconçues

Face à ses patientes, le docteur Hubin a en effet réalisé que les femmes ont besoin de rejeter les prophéties autoréalisatrices qui mettent une barrière mentale, comme par exemple : "Je ne jouis pas lors de la pénétration". Cela passe par le fait de leur permettre de trouver ce qui les conduit à l’extase en fonction de leur morphologie et, ainsi, d'enrichir leur sexualité tout au long de la vie.
Car la connaissance de sa génitalité, de son sexe, est bien une étape fondamentale pour accroître désir et plaisir. "À condition d’être réceptive et ouverte à cela, l’autostimulation est la voie royale pour découvrir ce qui nous donne plus ou moins de plaisir. Ce serait un non-sens de se forcer, mais si on en a envie, il est intéressant de s’explorer", poursuit Alexandra Hubin.

Mieux se connaître permet de guider l’autre pendant un rapport sexuel. La recherche peut alors se faire avec le partenaire. Car c’est bien là, in fine, que le plaisir sera le plus intense. Dans un échange entre deux corps complémentaires, aux polarités opposées, en tout cas si le partenaire est un homme.

S’écouter et ralentir = plaisir

En somme, pour mieux guider l’autre, il faut savoir s’écouter, être présente à soi. C’est le fondement du Slow Sex. Une théorie issue du tantrisme et du taoïsme, née aux États-Unis et qui se répand en Europe grâce aux sexologues : "En thérapie, on oriente volontiers les femmes en difficulté vers la pleine conscience. On les invite à prendre leur temps, à ne pas courir après un orgasme à tout prix. Mais à profiter de tout le chemin jusqu’à un éventuel orgasme", insiste le Dr Hubin.
L’écoute de soi est le meilleur guide : on saura alors si l’on désire des caresses plus douces, plus appuyées, une pression plus ou moins forte. Une écoute valable aujourd’hui et des désirs sans doute différents demain.

"Le terme 'slow' est porteur", s’amuse Anne Descombes qui, avec son époux Jean-François, a importé The Making Love Retreat® de l’Américaine Diana Richardson, des retraites pour couples. "Mais en réalité, le 'slow' est seulement une conséquence : si l’on met de l’attention dans notre corps, on ralentit naturellement le rythme lors d’une relation sexuelle."
Le constat est simple pour les auteurs de Slow sex, faire l’amour en conscience (2) : dans une société où on nous apprend à faire plutôt qu’à être, on s’éloigne du moment présent, on est trop occupé à imaginer le futur, à le planifier, à s’en inquiéter. Trop souvent dans l’attente, en cherchant à reproduire une belle expérience sexuelle ; trop dans l’action, on s’absente de soi-même pour penser au plaisir de l’autre : on se demande s’il apprécie le moindre de nos gestes, on cherche à faire quelque chose pour lui procurer du plaisir... et on s’éloigne trop souvent de notre corps, et de notre propre plaisir.

Lors des retraites que le couple organise, les participants échangent, se libèrent des idées reçues et s’aperçoivent souvent qu'ils sont encombrés d’habitudes, prisonniers d’un conditionnement sexuel ambiant.

Orgasme ou plaisir ?

Le conseil d’Anne Descombes pour avancer sur le chemin de l’amour en conscience : être plus vraie, davantage respecter ce que l’on ressent : "Souvent la femme n’est pas tout à fait prête pour la pénétration, mais pour l’homme, c’est le moment. Elle dit oui, mais elle n’est pas vraiment ouverte. Les femmes doivent davantage prendre le risque de dire à leur amant qu’elles ne sont pas prêtes."
Quitte à déstabiliser son partenaire et à s’éloigner de la recherche de l’orgasme comme but ultime ? C’est un risque à prendre, sans aucun doute, pour Anne et Jean-François Descombes : "La poursuite de l’orgasme nous éloigne de ce que nous vivons dans l’instant."

L’approche Slow Sex ne remet pas en question l’orgasme, mais l’habitude d’aborder systématiquement le rapport sexuel avec cet objectif. Elle propose des expériences nouvelles : "Et si on n’allait pas à l’orgasme, et si on jouait à l’oublier ?" Objectif : replonger dans une quête de plaisir innocent et pur qui peut être atteint par une profonde relaxation mentale et physique.
Les retrouvailles intimes deviennent l’occasion de rechercher une détente totale des zones d’inconfort. Et notamment de tout le plancher pelvien, en relâchant les tensions musculaires dans le bassin, dans les fesses, autour du périnée. On tient et on retient beaucoup dans cette zone et les organes génitaux deviennent alors durs et insensibles. Apprendre à les détendre permet d’accroître leur sensibilité.

L’éducation sexuelle des jeunes 

La sexualité et le plaisir féminin sont certes moins tabous aujourd’hui mais le sujet n’en reste pas moins délicat à aborder avec ses enfants, a fortiori avec les grands. "Le meilleur moyen pour sensibiliser les ados et les jeunes adultes à cette question, c’est de laisser traîner des livres", sourit Anne Descombes, dont la maison d’édition vient de traduire Cool Sex (3), un petit manuel sous-titré "Sexualité plus cool… vie amoureuse plus simple ?" qui ambitionne de déconstruire l’image stéréotypée de la sexualité fondée sur la performance.

Plus largement, le plaisir féminin mériterait d’être abordé de manière décomplexée avec nos enfants. C’est même une urgence pour Alexandra Hubin.
Certes, les petits garçons et les petites filles s’explorent. Mais alors que chez les garçons l’organe du plaisir est externe, celui des filles est en grande partie interne. Les garçons le voient donc davantage réagir et ils ont également l’habitude de le manipuler pour l’hygiène : "Nous devons pourtant dire aux enfants que le clitoris est une partie sensible du corps qui peut donner beaucoup de plaisir. Cela peut passer par une planche d’anatomie, de manière décomplexée", propose la sexologue.
Un pas a été fait en ce sens avec la parution, pour la première fois à la rentrée 2017, d’un manuel scolaire représentant décemment le clitoris

Références :
(1) Entre mes lèvres mon clitoris, d’Alexandra Hubin et Caroline Michel, éditions Eyrolles.
(2) Slow sex, s’aimer en pleine conscience, de Anne et Jean-François Descombes, éditions Marabout.
(3) Cool sex, sexualité plus cool… vie amoureuse plus simple ?, de Diana Richardson et Wendy Doeleman, éditions Almasta.

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