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Grippe A : Pourquoi des lois d'exception ?

Mis à jour le 25 février 2021

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L'article 3110-3 du code de la santé publique en vigueur depuis le 29 août 2007, est très clair. En cas de problèmes sanitaires liés à l'usage de médicaments en dehors de ses conditions normales d'utilisation, de celles prévues par son AMM (autorisation de mise sur le marché), « ou bien d'un médicament ne faisant l'objet d'aucune de ces autorisations, » le corps médical est protégé de toutes poursuites judiciaires tant qu'il s'agit de combattre une menace sanitaire et que « l'administration du médicament a été recommandée ou exigée par le ministre chargé de la santé ». Responsables mais pas coupables... Oui, en quelque sorte.



Cette exemption française concerne aussi les laboratoires pharmaceutiques. « Le fabricant d'un médicament ne peut davantage être tenu pour responsable des dommages résultant de l'utilisation d'un médicament, ajoute l'article 3110-3, lorsque cette utilisation a été recommandée ou exigée par le ministre chargé de la santé. »


Immunité judiciaire


Outre-Atlantique, le même type d'impunité judiciaire a été décrété aux Etats-Unis le 15 juin 2009. L'amendement signé par Kathleen Sebelius, la ministre de la Santé et des Services sociaux de l'administration Obama, garantit l'immunité aux services de la santé ainsi qu'aux laboratoires fabriquant le Tamiflu, le Relenza (deux antiviraux utilisés dans le traitement des grippes aviaire et porcine, mais dont l'efficacité reste contestée, ndr), les vaccins à venir anti-pandémie H1N1 et « les adjuvants qui leur seront associés ». De quoi prémunir l'ensemble des intervenants de la chaine pharmaco-chimique de tout éventuel procès ruineux en cas de scandales sanitaires dus à l'injection des vaccins.



Ce « parapluie doré » date en fait des années Bush. Le Public Readiness and Emergency Preparedness Act (PREPA), passé en décembre 2005, s'applique déjà aux vaccins H5N1, H2, H6 et H9. Dans le cadre du PREPA, la responsabilité judiciaire des fabricants et des soignants est dégagée dans le cas d'un traitement visant une « urgence de santé publique ». Cette immunité inclut une forme de « sanctuarisation financière », puisque les fabricants sont préservés de toutes demande de dommages et intérets.



Le PREP Act a fait l’objet d'une bataille farouche, les compagnies pharmaceutiques menaçant de ne plus produire de nouveaux vaccins sans l'adoption préalable de cette loi.



Un exécutif aux pouvoirs étendus


Ces régimes d'exception ne s'arrêtent pas aux seuls bénéfices des industriels ou des autorités sanitaires. Elle accorde aussi des pouvoirs spéciaux à l’exécutif en cas d'épidémie ou de pandémie de grippe A. Un projet de loi en ce sens a été adopté en Belgique le 22 septembre dernier. En France, le Syndicat de la Magistrature refuse le plan du ministère de la justice en cas de pandémie de grippe H1N1, qualifiant les propositions faites en vue de limiter la diffusion du virus de « dispositif liberticide ».



Les propositions du gouvernement français, formulées en juillet 2009, envisage de confier les audiences pénales à un seul magistrat, de généraliser les débats sous huit clos. Et, lors d’une garde à vue, de ne permettre de voir son avocat qu’à la 24e heure de détention et non au début. Les délais de détention provisoire pourraient aussi être prolongés de 4 à 6 mois sans audience ni débat devant le juge.

Autant de mesures qui témoignent selon le Syndicat de la magistrature de la « volonté de créer une justice d’exception par ordonnances gouvernementales, sans débat démocratique » cite le Point.



Ces inquiétudes font écho à l’analyse du médecin et député socialiste Jean-Marie Le Guen, également président de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), dénonce justement une gestion des décisions prises sous le sceau du « secret défense ».



En février 2009, dans son avis sur les « questions éthiques soulevées par une possible pandémie grippale », le Comité Consultatif National d'Ethique (CCNE) précise en réponse à la saisine de l’AP-HP faite en juillet 2007 (au temps de la grippe aviaire) que « si le CCNE est bien conscient que ces restrictions aux libertés fondamentales pourraient s’avérer nécessaires, il attire l’attention sur le danger qu’il y aurait à les étendre au-delà de ce qui est nécessaire à la lutte contre la pandémie grippale (…) l’état d’urgence sanitaire ne dispense pas du respect de la vie privée des personnes et de la confidentialité des informations relatives à leur santé ».

Charles Antony

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